Ils sont adhérents à Énergie d’ici : la Maison Meneau

Bonjour Monsieur Lassalle Saint-Jean, pouvez-vous vous présenter en quelques mots ?

Je suis le fils du précédent patron de la Maison Meneau qui est une entreprise familiale créée en 1879. Je suis un autodidacte, mon papa qui avait repris à Maurice Meneau l’entreprise au sortir de la 2nde Guerre mondiale a géré cette entreprise moins longtemps maintenant que mon frère et moi-même.

Où et comment commence l’histoire de la Maison Meneau, qui fabrique aujourd’hui des sirops et des jus de fruits ?

Mon père a fait sa thèse sur la « caramélisation du sucre de canne du port de Bordeaux pour l’utilisation de ce colorant naturel dans les eaux de vie d’Aquitaine et d’outre mers » et il a fait les tests grandeur nature chez Maurice Meneau, le patron à l’époque de La Maison Meneau. L’entreprise a d’abord été une liquoristerie.  Grâce à cette thèse, mon père a apporté cette couleur de caramel naturel aux liqueurs de la Maison Meneau (qui sont blanches au départ après distillation).

Pendant la 2nde guerre mondiale, l’activité s’arrête. Au sortir de celle-ci, Maurice Meneau ne souhaite pas redémarrer et mon père, plus jeune, rachète l’entreprise.

À cette époque d’après-guerre, il n’y a ni sodas ni jus de fruits. Les jus de fruits, qui sont la boisson familiale par excellence, sont souvent fabriqués à la maison. On commence à en trouver avec les sirops de fruits et de plantes dans les magasins coopératifs ou dans les cafés et hôtels-restaurants. C’est le début des « Perrier menthe », du « Ricard tomate » avec du sirop de grenadine, mais aussi du » Monaco » avec la limonade et la Grenadine. Pendant les 30 Glorieuses, le sirop est présent un peu partout. Mon père décide de fabriquer de plus en plus de sirops distribués sous la marque Marie Bouchard du nom de jeune fille de Mme Meneau.

Avec mon frère et mes sœurs, nous avons grandi dans cette entreprise familiale, habitant à côté de l’usine. Chaque fois que nous ne travaillons pas à l’école et qu’il y a un souci à l’usine, on va donner un coup de main. Les employés nous connaissent depuis que nous sommes tout petits. Et puis, notre maman décède d’une maladie et notre père pense vendre l’entreprise… A cette époque, je fais des études en Faculté d’histoire et j’ai la ferme intention de faire du journalisme ou de réussir dans le sport collectif. Je n’avais pas du tout l’objectif de reprendre l’entreprise.

Après votre père, vous et votre frère avez repris la direction de la Maison Meneau…

Notre quotidien était rythmé par l’entreprise, puisque c’est elle qui faisait vivre la famille et qui me permettait notamment de faire des études. Mon frère, qui a 4 ans de plus que moi, rejoint l’entreprise et peu de temps après, notre père décède dans un accident de voiture. Ça a été un choc pour tous. J’étais encore étudiant et la question de la succession de l’entreprise s’est posée. Nous avons géré cela seuls avec mon frère et mes sœurs. Nous ne comptions pas reprendre l’entreprise au départ.

Et puis, le comptable de notre papa nous a dit : « C’est quand même une belle histoire cette entreprise, votre père y a travaillé toute sa vie, vous avez grandi à côté, le personnel s’inquiète de savoir ce qu’il va devenir ». En effet, le personnel perdait son patron historique. Un patron qui a fait son réseau pendant toute sa vie, durant la guerre, quelqu’un qui a été assez intelligent pour recevoir des Allemandes et des Allemands dans le cadre de la réunification franco-allemande en participant aux  premiers comités de jumelages. C’est à la fin de sa vie que beaucoup de gens ont compris tous ses engagements.

Vis-à-vis du personnel, et pour perpétuer ce savoir-faire nous avons décidé de reprendre l’entreprise avec mon frère. Advienne que pourra ! C’est ce qui se qui s’appelle aujourd’hui être « Autodidacte », j’ai donc appris le métier sur le tas.

J’ai commencé assistant de direction. Vincent, mon frère, était PDG et il l’est toujours. Je suis maintenant directeur général. Des proches de notre père, nous ont aidé à nous diriger vers les bonnes personnes pour continuer à développer l’entreprise.

Aujourd’hui, la Maison Meneau, c’est 30 à 40 personnes selon la période de l’année. Nous avons enlevé toute la pénibilité au travail dans le cadre du programme usine du futur de la région Nouvelle Aquitaine, sans négliger le savoir-faire historique, avec 40 personnes, nous fabriquons ce qu’aurait fabriqué mon père avec 80 à 85 personnes. Nous produisons de 4000 à 7000 bouteilles à l’heure, 100% bio, équitable majoritairement et avec de l’énergie renouvelable ! Nous vendons majoritairement en magasins bio et dans des cafés – restaurants en France, mais aussi dans des magasins d’une vingtaine de pays à l’étranger. Nous sommes leader sur le marchés bio, dans le secteur des magasins spécialisés avec notre gamme de sirops bio équitable. Nous sommes connu comme LE sirop des magasins bio parce que nous avons été les premiers à faire du sirop bio et équitable, alors qu’il y en n’avait pas.

Depuis longtemps, vous intégrez des valeurs environnementales et sociales fortes dans l’activité de l’entreprise ?

Oui. Nous privilégions toujours les relations de long terme, avec nos producteurs et nos clients, pour favoriser une proximité et une sécurité économique pour chacun.

Dans les années 1995 – 1996, avec mes sœurs, nous avons mené une réflexion pour aller vers l’agriculture biologique et décidé que les sirops de notre père deviendraient bio et certifié. (Ecocert)

Nous nous sommes toujours posé la question de notre impact. En passant en bio, cela pouvait devenir par exemple plus cher pour certains de nos clients, alors avec certains d’entre eux, on s’est dit que plutôt que de faire quatre livraisons par mois, nous en ferions qu’une, ainsi, cela coûte moins cher en transport et le bilan carbone est meilleur.

Nous avons des producteurs de sucre de cannes en Amérique du sud, qui faisait déjà du sucre bio à l’époque puisque les intrants chimiques étaient trop chers pour eux. Nous avons signé un accord pour que la Maison Meneau s’engage à leur acheter ce sucre de canne chaque année et nous avons mené une étude pour savoir combien cela leur coûtait réellement, en tenant compte des différences de prix qui existaient entre le conventionnel et la bio. C’était le début de notre démarche de commerce équitable. On s’engageait ainsi pour une juste rémunération des producteurs.

On s’engage également maintenant dans le réemploi, avec les bouteilles consignées en travaillant avec le réseau Bout’ à bout’ et avec l’enseigne Biocoop.

Pouvez-vous nous parler un peu plus des boissons que vous fabriquez ?

A la reprise de l’entreprise, nous avons arrêté les liqueurs. Nous avons bien sûr continué de faire des sirops, puis des Pur jus Bio.

Un jour, des clients m’ont dit : « Ton sirop d’orange, il est vraiment super », Savez-vous pourquoi ? Parce que ça dépend des oranges que l’on utilise, il y a différentes variétés et différents pays d’origine, il faut choisir les meilleures ! La recette de fabrication est propre à la Maison Meneau. C’est la recette historique de l’entreprise. Nous ne l’avons jamais changée et nous n’avons jamais voulu changer aucune recette d’ailleurs. Ces mêmes clients m’ont dit alors : « Pourquoi tu ne nous ferais pas du jus d’orange ? ». Ça n’était pas notre métier d’origine, et c’est comme ça que nous avons commencé à faire des Pur jus de fruits bio.

Depuis nous faisons également des infusions de thé glacé, nous infusons nous-mêmes le thé. Puis on fait nos limonades. Dans une limonade au ginger par exemple, nous travaillons nous-mêmes le gingembre frais. Voilà, on essaie d’être des artisans du plaisir du goût, jusqu’au bout.

Après la bio et le commerce équitable, est venue la question de la provenance de l’énergie qui alimente votre entreprise…

Oui, si je fais attention à la terre, il faut que je fasse attention aussi aux électrons.

Avec mon frère, nous avons également participé au développement d’un lieu alternatif appelé « Darwin » à Bordeaux et je voulais absolument y installer des panneaux photovoltaïques au-dessus du restaurant et de la brasserie de bières bio Lalune. Notre réseau de connaissances nous a amené à Énergie d’ici. Le projet de panneaux photovoltaïques lui, s’est transformé aussi en ombrières sur le site de production et son installation sera terminée en juillet de cette année.